Guillaume Lemoine, référent biodiversité et ingénierie écologue pour l’Établissement Public Foncier - Nord-Pas de Calais, vient de publier un article dans le dernier bulletin la Société Botanique du Nord de la France sur la biodiversité des friches urbaines et sur l’importance de développer une approche dynamique dans leur conservation, gestion et ré-usage.
Les friches urbaines sont des espaces de nature "en attente", délaissés des activités humaines parfois même des naturalistes et pourtant riche en biodiversité. Souvent très hétérogènes, on y trouve des habitats divers et variés, des espèces végétales de toutes origines, une faune sauvage parfois même domestiquée ou ensauvagée.
Les friches jouent un rôle majeur dans le maintien de la biodiversité urbaine et se définissent comme des réservoirs de biodiversité, composants importants de la Trame verte et bleue urbaine. Ces zones de friches sont notamment indispensables à la conservation des populations de pollinisateurs sauvages tels que les bourdons et abeilles solitaires.
Ces espaces de biodiversité sont souvent "temporaires" car voués à être réaffectés par divers projets d’urbanisation. Diverses études ont démontré qu’une friche pouvait atteindre son potentiel "maximum" de biodiversité au bout de 10 à 15 ans, ce qui correspond généralement au temps de réalisation d’un projet d’urbanisme. Pourtant laisser la nature se développer peut entrainer l’installation d’espèces protégées, qui pourrait compromettre le projet d’urbanisation (dérogation indispensable pour destruction d’espèce protégée et de son habitat).
Des solutions sont envisageables et déjà réalisées dans d’autres pays tels que les Pays-Bas. Cette perte peut alors être compensée par la création d’espaces dynamiques (chantiers, friches…) à proximité qui serviront de zones de refuge "temporaire » aux espèces qui se déplaceront aux grès des opportunités qu’on leur offre
L’Établissement Public Foncier Nord-Pas de Calais est propriétaire « temporaire » de nombreuses espaces urbains déconstruits en attente de réaffectation. Pour éviter l’arrivée d’espèces non désirées (protégées, exotiques envahissantes, rudérales, ligneuses, allergènes…) qui transformeront ces espaces en « friches », l’EPF a décidé de réaliser des verdissements pour couvrir les sols et les rendre impropres à la germination spontanée de nombreuses espèces végétales problématiques (des espèces protégées aux espèces envahissantes). Les mélanges implantés visent également à apporter un couvert favorable aux pollinisateurs sauvages et autres invertébrés. Il s’agit ici de favoriser des espèces en conditions défavorables de conservation tout en améliorant le cadre de vie du quartier et en limitant les coûts de gestion de ces espaces en attente.
D’autres projets pourraient également être imaginés comme la création d’éco-parcs à destination des habitants du quartier mais la nature "temporaire" de ces espaces risque de rendre l’urbanisation de ces espaces difficile à se concrétiser par la suite… les riverains risquant de s’habituer à ces lieux de tranquillité et nature rendus accessibles..
Une troisième piste d’idée serait de créer des lieux favorables à la biodiversité (mares, talus, bocage...) sans accès public pour ne pas créer de sentiments de frustration lorsqu’ils seront détruits...mais on prend alors le risque d’accueillir des espèces protégées ce qui peut rendre le projet urbain compliqué et serait contraire à l’idée de départ…sauf à avoir obtenu au préalable l’autorisation de l’Etat (DREAL) de détruire ce qui a été créé de façons volontaire et temporaire.
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Référence bibliographique : Lemoine Guillaume (2016), Flores et pollinisateurs des villes et des friches urbaines Bulletin de la Société botanique du Nord de la France, 2016, 69 (1-4) :103-116
Plus d’information sur la revue Société Botanique du Nord de la France
Cet article vous a plu et vous souhaitez en savoir plus sur les usages des friches urbaines par l’Établissement Public foncier Nord – Pas de Calais, nous vous conseillons de lire un second article qui parle de la place des friches dans l’écosystème urbain, et comment les préverdissements réalisés qui répondent à des objectifs divers et complémentaires peuvent participer au concept de ville durable
G.Lemoine, 2017. Usages temporaires des friches urbaines de l’Établissement Public Foncier Nord–Pas-de-Calais : une contribution aux villes durables ? TSM 2017 ; 3 : 51–59 est disponible pour les abonnés de la revue Techniques Sciences Méthodes (TSM). de l’Association Scientifique et Technique pour l’Eau et l’Environnement (Astee) , www.astee.org
Résumé
La ville est un espace dynamique qui vit au rythme des mutations économiques, commerciales, sociales et foncières. En certains endroits apparaissent ainsi des friches qui, une fois déconstruites et en attente d’affectation, voient l’expression de dynamiques naturelles notamment de colonisation végétale. La qualité variable des sols en place et des végétations urbaines qui s’y installent peuvent parfois poser quelques problèmes aux riverains et aux aménageurs. En Nord – Pas-de-Calais, l’Établissement public foncier, outils de renouvellement urbain, confronté à cette problématique a décidé de réaliser des préverdissements à grande échelle. Ceux-ci favorables à l’intégration du site dans son territoire, à la biodiversité et à la lutte contre les îlots de chaleur urbains veulent être une contribution de l’Établissement au concept de « ville durable ».